"Exploring the future of work & the freelance economy"
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« De plus en plus d’infirmiers deviennent indépendants », titre la presse flamande. Vrai ou faux ? Factcheck.

« Au cours des quatre dernières années, le nombre d’infirmiers indépendants dans le secteur belge de la santé a augmenté de 35 %. » Voilà ce que nous pouvions lire dimanche matin dans de Zondag, une tasse de café à la main et un croissant frais en bouche. Et d’ajouter : « Il n’y a pas d’infirmiers indépendants dans les hôpitaux, sinon il s’agirait de faux indépendants. Par ailleurs, les titres-services gratuits pour les aides ménagères apportent un vent de popularité sur le statut d’indépendant dans les soins de santé. » Peut-on croire ce qu’on lit ? NextConomy a vérifié les faits.

35 % de croissance par an ? Chiffres objectifs et à jour à propos des freelances

Fait. Notre pays manque de chiffres objectifs et à jour concernant le marché du travail – concernant le nombre de freelances. Il existe des statistiques fiables et mises à jour, provenant entre autres de Steunpunt Werk et du VDAB, sur le nombre de personnes ayant un emploi rémunéré, les chômeurs et tous les mouvements entre ces deux catégories. Mais aucunes statistiques comparables sur les personnes qui quittent un emploi salarié et poursuivent leur carrière en tant qu’indépendants dans un environnement B2B. Les freelances sont donc « le sujet tabou » : ils sont là, leur nombre augmente, mais personne ne peut quantifier et suivre le mouvement comme on le fait pour les salariés.

Est-ce un problème ? Oui, surtout lorsque les articles de presse présentent des pourcentages et des informations incomplètes. Car si l’on considère les chiffres absolus, le constat est un peu plus nuancé. Selon StatBel, il y avait 9 281 infirmiers indépendants en 2020, soit à peine 10,47 % des 88 644 employés à titre principal et des 3 149 employés à titre complémentaire (voir graphique).

En y ajoutant 35 %, le taux de croissance annuel est de 1 087 infirmiers indépendants. Un chiffre qui n’est pas si mauvais et qui, de surcroît, peut en réalité être inférieur en valeur nette car le nombre de personnes qui interrompent leur activité salariée, c’est-à-dire les infirmiers indépendants, n’est pas connu et n’est donc pas pris en compte.

Conclusion : en l’absence d’un contrôle permanent et objectif de la partie du marché du travail occupée par les freelances, aucun chiffre actuel ni précis n’est disponible. L’affirmation est donc discutable.

À peine 10 % des infirmiers sont indépendants à titre principal. Si le pourcentage de 35 % est correct, le taux de croissance annuel n’est que de + 1 087 infirmiers indépendants.

Ill. 1 – StatBel, personnel des soins de santé 2020


Une fois de plus, je lance un appel à Jo Brouns, Pierre Yves Dermagne, Steunpunt Werk et à d’autres politiciens et universitaires afin qu’ils se penchent sans tarder sur un contrôle du marché du travail englobant toutes les personnes employées, qu’elles soient salariées ou indépendantes. Toutes ces personnes contribuent à la réussite des organisations dans notre pays. Par ailleurs, des faits et des chiffres sont indispensables pour refléter objectivement la réalité et établir des politiques publiques durables et innovantes – et assurément des lignes de conduite RH au sein des organisations.


Vous ne trouvez pas d’infirmiers indépendants dans les hôpitaux. Vrai ou faux ?

Fait. Cette affirmation est non fondée ; il existe en effet de nombreux postes vacants pour les infirmiers indépendants dans les hôpitaux. Quiconque se donne la peine de consulter les sites web de certains hôpitaux ou intervenants intermédiaires s’en aperçoit immédiatement.

Conclusion : nous considérons cette affirmation comme non fondée.

Le risque de faux travail indépendant si vous n’avez qu’un seul client. Vrai ou faux ?

Fait. Nous disposons en Belgique d’un cadre législatif qui, en soi, est assez simple, pour autant que l’on prête attention aux quatre critères juridiques qui y figurent :

  1. la volonté exprimée par les parties dans le contrat ;
  2. la liberté d’aménagement du temps de travail ;
  3. la liberté d’organisation du travail ;
  4. la capacité d’exercer un contrôle hiérarchique (autorité légale).

Conclusion : aucun critère ne détermine donc le nombre de clients que l’on peut/doit avoir en tant qu’indépendant. Le risque de faux indépendant est donc non fondé si l’on n’a qu’un seul client.

Le statut d’indépendant serait-il apprécié, en partie grâce aux titres-services gratuits. Vrai ou faux ?

Fait L’enquête annuelle Freelancer Focus d’Unizo montre une croissance du nombre de freelances dans tous les secteurs, alors pourquoi en serait-il autrement dans les soins de santé ? Aujourd’hui, les travailleurs se réveillent et réalisent qu’ils doivent être responsables de leur propre vie professionnelle. Unizo a calculé une croissance de +20 % pour la période 2018 – 2021 dans tous les secteurs, même pendant la pandémie.

Le problème de la vision classique du travail est que le paradigme a changé de visage. Qu’est-ce qui se passe aujourd’hui ? Le talent a désormais du pouvoir. Et chacun commence à imposer comment, quand, où et avec qui il veut travailler. Les travailleurs se rendent compte qu’ils ont été floués par des employeurs qui leur avaient promis la sécurité et une carrière à vie.

L’avenir du travail a déjà commencé : il y aura de plus en plus de personnes très instruites à la recherche de tâches et de projets intéressants à court et à long terme, axés sur les résultats, pas sur la satisfaction béate des salariés et l’espérance de vie. L’époque où table de ping-pong et cantine alléchante faisaient la différence auprès des nouvelles recrues est révolue.

Certains freelances recherchent des missions par eux-mêmes et entrent en coopération directe avec leurs clients. Ils négocient alors librement les tarifs et les conditions de cette collaboration. D’autres choisissent de passer par un intermédiaire, un prestataire de services RH classique ou un FMS (Freelance Management System), qui les aide dans la recherche de mandats et leur fournit un soutien administratif. Les talents freelance sont également rares et difficiles à trouver. C’est pourquoi certains intervenants proposent des bonus pour attirer les meilleurs talents. Mais des titres-services gratuits sous prétexte que vous êtes freelance ne sont pas de mise.

Conclusion : nous considérons cette affirmation comme non fondée.

Histoire de bien fermer la porte et d’éviter un exode des meilleurs talents, hautement qualifiés, vers des statuts d’indépendants, les organisations doivent mettre en place des politiques de ressources humaines plus innovantes, qui répondent aux aspirations de leurs collaborateurs. Leur laisser plus d’autonomie et les encourager à être plus ambitieux, décider où, quand et comment ils travaillent, les laisser vivre leur passion, voilà des arguments qui ne manquent pas d’intérêt. Ce sont précisément ces éléments qui ressortent de toutes les enquêtes sur la motivation des freelances. Bonne nouvelle, n’est-ce pas ? Parce qu’en tant qu’employeur, vous pouvez aussi offrir ces avantages à votre personnel. Même dans le secteur des soins de santé.

Réponse de Mieke Bruynickx d’Acerta

Mme Bruynickx n’a pas répondu à notre demande.

Source : De Zondag du 19/03/2013

Source : StatBel

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Marleen Deleu
Marleen Deleu - Director Trends & Insights NextConomy - on a mission to bring insights and expertise to the freelance workforce and users of contingent labor in Belgium Voir tous les articles de #Marleen Deleu