"Exploring the future of work & the freelance economy"
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Stefaan Vandist : « Un réseau est nettement plus utile que partager un espace de travail avec des personnes qui, par hasard, font partie du même organisme. »

Le passage à la nouvelle économie, avec la durabilité et la circularité comme concepts clés, sous-entend aussi un changement dans la relation entre travailleurs et entreprises. Le travail s’effectuera de plus en plus sur base de projets, en menant même parfois plusieurs ‘jobs’ en parallèle. « Vous disposez de plusieurs sources de revenus, et votre travail est comme un tableau de bord sur lequel apparaît l’ensemble de vos activités. »

C’est ce que Stefaan Vandist désigne par une armée unipersonnelle. Il a travaillé pendant 10 ans dans le secteur de la publicité comme planificateur stratégique au service d’entreprises classiques, mais fut réellement fasciné par la ‘nouvelle économie’, où durabilité et circularité occupent une place centrale. Aujourd’hui, son armée unipersonnelle aide les entreprises dans leur transition vers cette nouvelle économie. Et la relation que ces organisations entretiennent avec leurs collaborateurs fait également l’objet de toutes les attentions. « Les entreprises ne se posent pas souvent la question en amont, mais elles se rendent vite compte qu’il y a à faire dans ce domaine. »

 

Quatre évolutions

Stefaan Vandist distingue quatre grandes évolutions en ce qui concerne l’économie et le marché du travail.  Elles touchent le travail & la vie privée, la décentralisation, le déficit d’attention et les multiples identités de la personne.

« Les Millenials, du fait de leur éducation et de la vie qu’ils mènent, ont une approche différente vis-à-vis de la représentation du travail », dit-il d’emblée. « Ils ne recherchent pas l’équilibre entre travail et vie privée, mais s’efforcent plutôt de conjuguer ces deux aspects. » Les jeunes sont aujourd’hui partisans d’un travail qui leur correspond, auquel ils s’identifient et qui a pour eux du sens. Ils font moins la distinction entre travail et vie privée, ou encore collègues et amis.

La deuxième tendance ? La décentralisation, affirme Stefaan Vandist. Il l’illustre par le succès de WeWork, une multinationale avec quelque 300 bureaux en coworking répartis dans 58 pays. Selon Stefaan Vandist, elle doit au départ son succès à l’idée que ce n’est pas le nombre de mètres carrés qui compte, mais la qualité du réseau qui va être engendrer. « L’avenir des bureaux partagés ne dépend pas des mètres carrés offerts ou des contrats d’occupation à long terme, mais de la force issue du réseau qu’ils forment, des idées qui émanent des personnes réunies, et de la capacité de toujours trouver dans ce réseau la bonne personne, celle qui vous permettra de progresser. La moitié de ceux qui pour des raisons diverses ont quitté le site, et qui ne partagent donc plus les bureaux, vont jusqu’à payer une location pour continuer à faire partie du réseau. De l’avis général, faire partie d’un réseau est nettement plus utile que partager un espace de travail avec des personnes qui, par hasard, font partie du même organisme. »

Un troisième constat a trait au non négligeable revers de la médaille technologique. Stefaan Vandist fait référence à des recherches menées notamment par l’American Psychological Association, qui indiquent qu’utiliser un écran supplémentaire réduit la productivité de 40%. Ce qui démontre que l’Homo sapiens ne serait pas capable de gérer plus d’un écran à la fois…

Et enfin, Stefaan Vandist évoque les différentes identités (y compris professionnelles) d’un individu. « De nos jours, un même individu peut parfaitement assumer plusieurs rôles professionnellement, apparaître sous différents profils dans l’économie, et ce notamment grâce à Internet », dit-il. « Dès qu’on commence à fréquenter les bancs de l’école, c’est vu comme la nouvelle normalité. Vous disposez de plusieurs sources de revenus, et votre travail est comme un tableau de bord sur lequel apparaît l’ensemble de vos activités », explique-t-il. « Le contraste avec la génération de mes parents est frappant : ils avaient un emploi, un positionnement sur l’échelle hiérarchique, et ils avaient des hobbys. Avec nous, tout est fusionné. »

 

Travailler en pods

Les quatre évolutions évoquées modifient les relations de travail entre individus et organisations. Elles sont développées dans ‘We, myself & AI’, le livre de Stefaan Vandist paru récemment, qu’il a co-écrit avec le trendwatcher Herman Konings.   Stefaan Vandist : « Je pense que c’est une relation plus liée à des projets. Le nombre de freelances ne va cesser d’augmenter : aux États-Unis, on prévoit qu’il y aura 50% de freelances d’ici 2025, et si l’Europe s’engage sur la même voie, le résultat risque d’être impressionnant. On travaillera du reste nettement plus sur base de projets. »

Le dynamisme pressenti par Stefaan Vandist a également pour effet d’estomper les certitudes du passé, du moins partiellement : les entreprises ne sont plus certaines de garder leurs collaborateurs, et les gens ne savent pas ce qu’ils feront dans deux ans. « Nous nous éloignons de la certitude de pouvoir travailler notre vie durant dans telle ou telle entreprise, et nous nous dirigeons vers la certitude de toujours avoir des jobs à réaliser, car nous aurons mis sur pied une activité et acquis de l’expertise. J’imagine bien un avenir où des outils basés sur l’IA contribueront à façonner les carrières », pense-t-il tout haut, évoquant des systèmes qui distribueraient en permanence des compétences, des connaissances et de l’expérience aux individus suivant les besoins du marché du travail.

Retour à la réalité. « Nombreux sont mes clients qui ont décidé de radicalement changer d’orientation afin de recréer leur organisation », explique Stefaan Vandist. « Et ce qui est étonnant, c’est que la plupart sont des organisations à but non lucratif : autorités publiques, domaine des soins de santé, environnement, musées… Les gens travaillent par exemple quatre jours suivant un mode de hiérarchisation classique, mais le cinquième jour ils forment des groupes autour de projets, des project pods. On peut ainsi être responsable de projet dans un groupe, et rédacteur ou chargé d’études dans un autre groupe. Vous obtenez dès lors une organisation apprenante, ou qualifiante, composée d’internes et d’externes. C’est le modèle de l’organisation du futur. »

 

Stefaan Vandist est ‘trendwatcher’ et consultant en innovation. Avec ‘We, Myself & AI’, le livre qu’il a co-écrit avec Herman Konings, il nous transmet un magazine de tendances novateur qui décrit les forces directrices du monde de demain.

Freelance journalist. Doet van horen, zien en schrijven over o.a. HR en de arbeidsmarkt. Voir tous les articles de Timothy Vermeir